Les insolites : formes et matières du costume de scène

Du 29 janvier 2011 au 15 mai 2011

Le Centre national du costume de scène et de la scénographie rend hommage aux costumiers et artisans du spectacle qui, faisant feu de toutes matières, même et surtout les plus inattendues, créent un univers décalé, poétique et fantastique, une profusion d’images puisées dans l’imaginaire contemporain.

Commissaire de l’exposition : Noëlle GIRET
Scénographes : Alain BATIFOULIER et Simon de TOVAR

Cette exposition est une invitation à explorer l’étrange univers de costumes de scène façonnés dans des matières bien éloignées des brocarts, dentelles, soies et satins de notre mémoire collective. Ils sont nés des recherches de formes et de matières poursuivies par les avant-gardes du début du XXe siècle – constructivisme, Bauhaus, futurisme – où s’expérimentent le carton, le bois, le métal, la toile cirée, le rhodoïd. Aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale, leur expansion est favorisée par les possibilités de nouveaux matériaux dérivés du pétrole.

Au gré de l’imagination du décorateur, le skaï, le lycra, l’éponge et le jute jouent la somptuosité, le caoutchouc devient métal, le plastique, cotte de maille, la ficelle et le latex se métamorphosent en délicates broderies, boulons, vis et clous se muent en bijoux. S’il utilise les textiles, le costumier, devenu alchimiste, s’emploie à les teinter, malaxer, brûler, lacérer ou superposer. Ce rude traitement nous fait oublier leur texture d’origine. Ce choix des synthétiques peut avoir des raisons pragmatiques – il est plus aisé de façonner une armure en plastique qu’en métal – mais l’essentiel n’est pas là. Ces matières libèrent l’imagination et offrent aux créateurs une source infinie d’inspiration dans le domaine des formes. Ces costumes, élaborés avec des matériaux improbables ou décalés, visent à l’illusion pure et participent, plus que d’autres, à un « ailleurs » spectaculaire, devenant pour certains de véritables « machines scénographiques ». Leur vocabulaire artistique, qui s’étend du « nouveau réalisme » à un fantastique puisé dans le cinéma, la science-fiction et la bande dessinée, est en continuelle évolution, voire révolution. Ces créations entretiennent une étroite connivence avec les arts plastiques, le design et la mode, domaines où, depuis plus de vingt ans, nous voyons exploser, dans une totale liberté, formes et matières, styles et tendances. Mais ces convergences ont leurs limites. Si nombre de costumes présentés dans cette exposition peuvent individuellement figurer dans un musée d’art contemporain, ce n’est ni leur rôle, ni leur fonction. Ils ne sont pas une oeuvre indépendante, libre et gratuite, ni une fin en soi.

Ils servent l’esprit d’une œuvre et s’élaborent au sein d’un collectif. Mariés aux décors, ils figurent dans un ensemble structuré par la lumière, qui en modifie les contours et les couleurs. Ils ont la charge de caractériser un personnage, de particulariser et accompagner le corps d’un comédien, d’un danseur ou d’un chanteur. Instruments de travail de l’interprète, avec qui ils jouent, bougent et vivent, ils se doivent d’être aussi pratiques et adaptés. Quelle que soit leur beauté, souvent extravagante, ils respectent l’adage du décorateur Lucien Coutaud : « Au théâtre on ne trouve jamais rien que par nécessité ».